Les cuvées de la confrérie…

Deuxième interview du blog avec Benoit Bail de la confrérie du rhum. Pour ce second essai, Je souhaitais me focaliser uniquement sur les cuvées de la confrérie. Car l’histoire du groupe Facebook, son expansion, etc  beaucoup d’entre vous la connaissent déjà.

Merci donc à Benoit d’avoir bien voulu répondre à mes questions et bonne lecture !

Peux-tu te présenter ainsi que ton groupe facebook ? Non je déconne…

Ahaha! Merci de m’épargner cela une nouvelle fois alors.

Le but de cet article est de se focaliser sur les cuvées de la confrérie. Peux-tu donc nous faire un recap’ de celles-ci ?
Pour moi, il y a le Barbados, Damoiseau, l’arrangé de Ced’, le Longueteau blanc, la Favorite, les deux HSE, le La mauny.. je n’oublie rien ?

Tu les as toutes citées, ne prenant pas réellement en compte la sélection du fleur de canne vieux de Saint-James pour la Belgique, qui n’était pas une cuvée en soit.

On sait que les premières cuvées étaient le souhait des « confrères », mais comment as-tu fait pour trouver ces deux premiers rhums? Et sur quels critères t’es tu basé (prix, provenance)?

Au départ, nous n’étions pas sûrs que cette histoire allait réellement fonctionner. Tout d’abord parce que nous ne sommes pas embouteilleurs, puis surtout parce que nous ne savions pas si tous les confrères demandeurs à l’époque allaient être prêts finalement à mettre la main à la poche ou si nous allions nous retrouver avec des bouteilles payées par nos propres moyens sous les bras.

Nous avons tout de même pris le risque d’investir de « petites » sommes pour acheter du rhum auprès d’un négociant allemand qui est une sous-branche de E&A Scheer aux Pays-Bas. Il proposait des rhums intéressants pour commencer, en quantité « sur mesure », que j’ai ensuite embouteillés moi-même, dans mon ancien atelier, où je produisais les rhums arrangés « Zwazo ».

En prenant en compte le prix de l’opération, les rhums disponibles pouvant éventuellement nous intéresser et les faibles quantités que nous envisagions pour ce test, nous nous sommes ainsi dirigés vers d’abord un Barbade 2000 de la W.I.R.D., puis ensuite vers un Guadeloupe 1998 de chez Damoiseau.

Je pense me rappeler que le succès a été assez immédiat. Les bouteilles coûtaient +- 50e… Comment avez-vous réagi à ce succès? Etait-ce prévu ?

J’avais « traficoté » un site internet avec les moyens du bord à l’époque pour pouvoir vendre ces bouteilles et en effet, le succès a été immédiat. Alors que nous ne savions pas à quoi nous attendre, notre teasing avait l’air de marcher.

Les deux premières cuvées tournaient autour des 50-60 € de mémoire. La Barbade 2000 dont nous comptions un peu plus de 50 bouteilles a été vendue en 4 minutes seulement.

La Damoiseau a mis une vingtaine de minutes pour environ 150 bouteilles.

Ce succès vous a motivé à voir plus grand, avec les singles cask la Favorite. Le temps de tout lancer avec eux, vous sortez 2 cuvées qui sont l’arrangé de Ced’ et le Longueteau. Ici encore, succès immédiat?
Comment s’est passé la sélection de ces deux rhums ?

Alors non, à vrai dire, La Favorite nous avait déjà sollicités pour des cuvées suite aux premières demandes des confrères, bien avant les deux premiers embouteillages.

Malheureusement, notre prise de décision et la mise en place ont pris du temps (2 ans en tout).

Pour ce qui est de toutes les cuvées produites après les deux premiers embouteillages, nous n’avons jamais sollicité personne. Ce sont toujours les producteurs qui se sont dirigés vers nous et nous ont fait des propositions, que nous avons même parfois dû refuser.

Mon ami, Cédric Brément, que je connaissais déjà avant tout cela de par notre activité similaire, a donc été le premier à nous contacter pour nous proposer de faire une cuvée commune à l’occasion de l’anniversaire du groupe.

L’idée a été très intéressante et nous avons tout de suite marché. Il nous a fait parvenir des échantillons de ce qu’il avait en tête. Le tout s’est fait très naturellement avec des échanges quotidiens. Nous avons ainsi pu sortir une cuvée anniversaire vieillie en fût de Sauternes et arrangée à l’ananas Victoria. Un succès!

Pour ce qui est de la cuvée de rhum blanc avec Longueteau, François Longueteau a eu la même démarche. Peu de temps après Cédric, il nous a fait une proposition en nous envoyant des échantillons en métropole et en nous expliquant qu’il comptait lancer des parcellaires.

C’est ainsi que nous avons eu l’occasion de lancer le premier parcellaire de Longueteau qu’était ce Canne bleue de la parcelle numéro 11. La suite aujourd’hui fait partie de l’histoire.

Penchons-nous sur la « première » grande cuvée Confrérie avec les single cask La Favorite 95. Cette cuvée est d’un prix bien supérieur aux autres, prix justifié par les 20 ans de ce rhum agricole. Comment le public a-t-il réagi ? En effet, beaucoup de confrères n’achètent pas de rhum à plus de 80€, est-ce que les 1000 bouteilles ont trouvé preneur ?

Le prix de ces cuvées a bien évidemment été justifié par l’âge de ce rhum. Un rhum agricole de 20ans d’âge a un coût, en effet.

Après quand on voit le prix que certains sont prêts à payer pour des rhums de mélasse bien plus jeune, on se dit que ça tombe sous le sens. Enfin bref, c’est un autre débat.

Verticale La Favorite 1995

Le public a bien réagi pour la majorité, mais en effet, ce rhum n’était pas donné à tout le monde. Nous savions que la vente de cette cuvée allait mettre plus de temps que les autres, mais cela fait aujourd’hui près de 2 ans déjà et les dernières bouteilles sont trouvables chez les cavistes. La majorité a cependant trouvé preneur et les retours sur le produit en lui-même sont plus que satisfaisants.

Je pense que notre dernière dégustation de ce rhum, qui a eu lieu chez Hubert Corman, à sa demande, a d’ailleurs clairement prouvé que cette sélection, certes plus chère, était finalement bonne et valait son prix. (Je confirme 🙂 )

Chez HSE, nous avons droit à 2 exclus car ils ne sortent généralement pas de full proof. A-t-il été difficile de les convaincre de faire ce genre de chose ? Etiez-vous bloqué sur le millésime 2007 par HSE ou pouviez-vous assez librement choisir ?

Alors, pour rappeler le but des cuvées de la confrérie, nous demandons toujours aux marques de nous surprendre en nous proposant quelque chose qui sort du commun pour nos membres et que la marque ne fait pas déjà. Sinon quel intérêt pour le groupe et ses amateurs?

La Favorite n’avait jamais fait de single cask avant la 1995. Longueteau n’avait jamais fait de parcellaire et Cédric n’avait jamais sorti de cuvée vieillie. Disons que la confrérie sert de « groupe test » pour les marques via ces cuvées. Nous apprécions cela car ça nous donne des produits différents à proposer aux membres, qu’ils ne trouveraient pas sans la confrérie du rhum.

Dans la même démarche, quand HSE nous a contacté pour faire une cuvée ensemble, voyant bien évidemment le succès des précédentes, nous leur avons demandé quelque chose de différent. La mode des bruts de fût étant arrivée dans les rhums de mélasse, le sujet a très vite été abordé et leur équipe était emballée par l’idée.

Les deux HSE 2007 de la confrérie du rhum

Lors de l’un de nos séjours sur place, avec Jerry Gitany, nous nous sommes donc rendus chez HSE pour faire la sélection du fût à embouteiller. Nous n’avons pas choisi « librement » bien évidemment, mais avions le choix entre différents échantillons correspondant aux critères que nous avions mentionnés ensemble au préalable.

Sébastien Dormoy et Cyrille Lawson avaient donc fait une présélection, que nous avons ensuite peaufiné ensemble. Nous sommes très vite tombés d’accord sur le fût à embouteiller. Le premier batch devait d’ailleurs être une cuvée unique.

A ce moment, nous n’avions pas encore en tête de faire un second.

C’est au Rhumfest de Paris, où avait lieu le lancement de cette cuvée, que je suis aller voir Cyrille Lawson pour lui dire que la quasi totalité des bouteilles disponibles sur le salon (presque 400/800) avaient été vendues en 2 jours. Suite à ça, il m’a directement proposé de choisir un second fût, car il était clair qu’il n’y en avait pas assez pour tout le monde.

Peu de temps après, nous avions donc sélectionné un second fût et la deuxième version était sortie. Nous avions volontairement voulu rester en 2007 pour ce second batch, pour créer une certaine continuité avec le premier.

La Mauny et le 2005, là encore, comment et pourquoi ? Perso, je le trouve très boisé. Etait-ce un profil que tu recherchais ou était-ce simplement ce que La Mauny pouvait te proposer pour rentrer dans le cadre budgétaire?

Nous avons toujours eu beaucoup d’affinités professionnelles et personnelles avec les distilleries des Antilles et donc également avec Maison La Mauny.

A force de passer du temps avec eux, l’idée d’une cuvée est ici, une nouvelle fois, venue sur le tapis. Bien évidemment, nous avions répondu oui, à condition de trouver un produit qui nous plaît et qui pourrait plaire au groupe.

Maison La Mauny n’avait pas sorti de millésime depuis son fameux 1998 et n’avait également jamais fait de single cask. Du coup, nous avions une base pour travailler. Daniel Baudin nous avait pour le coup envoyé des échantillons sur Paris. Jerry et moi avions passé un bon moment à nous décider, car pour une fois nous n’étions pas d’accord.

Finalement, nous nous sommes décidés pour ce 2005, alors qu’il y avait un second fût en compétition. On nous a informés que ce dernier a d’ailleurs par la suite été vendu à une embouteilleuse indépendante qui vient de sortir plusieurs embouteillages de la maison. (Compte sur moi, je ne dirais rien 🙂 )

Nous trouvions que le côté épicé était agréable, différent et surtout différent des produits que La Mauny avait sur le marché à ce moment-là, ce qui pouvait donner un nouvel élan à la marque.

Au final, il y a eu du bon et du mauvais. Les gens qui aiment, aiment beaucoup, et les autres très peu.

C’était un choix. Après, vu la quantité et la qualité du produit, nous savons qu’il y aura toujours des preneurs tôt ou tard.

Bon, un petit scoop ? New grove, je sais déja mais y’aurait pas un autre truc dans les tuyaux ? Genre un Neisson 2012 ?

Bon, je t’écris en direct de l’avion en direction de la Réunion puis de l’île Maurice. Nous allons clairement dédier 2018 à l’Océan indien et pour le coup aux rhums de mélasse. Nous finissons 2017 avec des bruts de fût de chez Bielle, normalement, si les conditions climatiques ne retardent pas trop la production.

Puis, nous présenterons une cuvée en collaboration avec New Grove, au Rhumfest Paris 2018, pour les 5 ans du groupe. Celle-ci sera pour la première fois également sélectionnée avec la participation d’un confrère, Ronan Hamon, qui a gagné le concours que nous avions organisé à cette occasion.

Ensuite, pour les fêtes de fin d’année, pour rester dans l’Océan indien, nous prévoyons un Single Cask de chez Rivière du Mât. Je dois avouer qu’au départ, Jerry et moi étions un peu suspicieux quand on nous a approchés pour ce projet, mais Rivière du Mât a mis le paquet et nous a présenté un single cask exceptionnel.

Nous nous rendons d’ailleurs sur place maintenant, pour le goûter à nouveau lors d’une visite de la distillerie.

A bientôt et encore merci à toi!

Merci à toi surtout et à bientôt pour les prochaines cuvées alors !