6 aout 1962, la Jamaïque devient officiellement indépendante et sort donc de l’empire britannique. La reine râle, les jamaïquains continuent à faire du rhum et Bob Marley enregistre sa première chanson Judge Not .
Afin de fêter tout ça dignement, Appleton décide en 2012 de sortir un belle carafe avec un rhum distillé cette année là. Fêter la première chanson de Bob avec un monument pareil me semble exagéré mais bon… pourquoi pas après tout.
Oui, rien que ça, un rhum qui aura vieilli 50 ans sous les tropiques ce qui fait donc de lui techniquement le rhum le plus vieux du monde (un long pond de 58 ans d’âge existe aussi mais élevé en Ecosse en grande partie).
800 bouteilles ont été produites hors de 13 fûts, le tout dans une superbe carafe de chez Glencairn en Angleterre.
Comme l’explique Joy Spence, la maître de chais, ces fûts auront été conservés durant tout ce temps dans un autre endroit que le reste des productions. Ils auront, limite, été enchainés au sol afin d’être sûr et certain de ne pas les perdre ou qu’ils ne soient utilisés à autre chose.
On lui aurait de plus expliqué que sa place ne tiendrait pas très longtemps si ces fûts étaient perdus 🙂 ….Gloup, bonjour le stress et on imagine la délivrance quand ce rhum a enfin été embouteillé !
Elle raconte d’ailleurs qu’elle goûtait ces fûts 2 fois par an afin de vérifier la qualité. Si ça c’est pas du professionnalisme !
A la fin du processus de vieillissement, ce rhum composé d’un blend colonne/pot still aura été doublement filtré à froid afin d’en retirer l’excédent boisé….
Tu m’étonnes, après 50 ans cela devait plus ressembler à un jus de bois qu’autre chose !
Sage décision donc de la distillerie…. c’est pas tout de faire vieillir ses rhums, le but final est quand même qu’ils soient buvables et l’expertise jamaïcaine pour faire ça bien n’est plus à démontrer.
De plus, un ajout de caramel aurait été constaté … bon là dessus, je sais que cela ne plaît pas à tout le monde car ce n’est pas mentionné, mais moi perso ça me choque moins.
Un rhum de 50 ans doit, à mon sens, subir quelques « ajustements » afin d’être plaisant. Nous ne sommes pas dans la même logique que d’autres « producteurs de rhums » qui balancent tout et n’importe quoi afin de faire ressembler leur alcool à du pseudo rhum. Puis, on parle d’Appelton ici quand même ! Mais je peux comprendre que ça ennuie…
Avant d’aller plus loin dans la dégustation, je voudrais remercier mon QDD de ce soir…. Enoooorme merci à toi !
Couleur : Rhum vieux, couleur plus foncée…cela paraît donc logique de retrouver un rhum assez gras, épais et sombre.
Nez : Le nez est très charmeur, sur la laque, le camphre, la vieille colle, vanille, orangette. Les épices sont bien entendu de la partie, comme souvent chez Appleton.
L’aération lui confère des arômes plus sucrés, caramélisés, fruités (banane cuite en tête et de la mangue), de fruits secs, du menthol et de miel. Un léger fumé nous accompagne tout le long de ce périple.
Ce nez est vraiment très doux et loin d’être un jus de bois…la double filtration semblait être une très bonne idée en tous cas !
On retrouve le côté de vieux jamaïquain dans ce rhum (dis comme ça, c’est limite prétentieux non ?). Oui, j’ai déjà eu l’extrême chance de goûter à deux très vieux rhums jamaïquains dont un Wray & Nephew chez mon copain Hubert Corman (que je remercie vivement d’ailleurs en passant).
C’est beau et sale en même temps… ce n’est pas simple à expliquer mais il y a un côté très chaleureux, pâtissier, mêlé à cette sensation de vieux garage (terme repris d’une dégustation chez ce même Hubert ©, j’avais rien compris à l’époque mais là, oui j’y suis).
Bouche : La bouche est plutôt grasse, liquoreuse, douce… la vanille est bien présente. Un gros côté « frangipane » est présent mais je n’arrive pas à le décrire mieux. Ce qui est sûr c’est qu’il ne m’est pas inconnu et me rappelle encore ces vieux rhums goûtés chez Hubert.
Le fruit exotique mûre vient après, sur la banane, la coco en force. Le pain d’épice et la fraîcheur mentholée vient compléter ce tableau.
La finale est sur la réglisse, ce rhum se mâche tellement c’est onctueux. La longueur est plutôt soutenue… c’est pas du Caroni mais l’ajout de sucre constaté ne tue pas le final je trouve.
Si je n’étais pas sur mon blog, j’éviterais de dire « bordel c’est bon ce brol » mais comme j’y suis, je ne m’en prive pas…. un vrai voyage dans le temps !
Verre vide: Comme c’est la fête, je rajoute les impressions du verre vide 1 heure après la fin de ce moment magique. Celui-ci nous laisse une belle sensation de cendré, grillé, caramel brûlé, coco grillée…
je ne pense pas le laver, je vais le laisser sous une cloche pour aller le respirer de temps en temps !
Coût: Là, ça fait un chouia plus mal en fait… on est entre 4500 et 5000 € la bouteille. Et honnêtement, si j’avais les moyens je ne m’en priverais pas.
Le côté symbolique et limité explique bien entendu le prix, mais 50 ans de vieillissement tropical, le travail avant et après n’y sont clairement pas pour rien non plus.
Je pense avoir goûté ce soir le rhum qui m’aura le plus marqué émotionnellement.
La plupart des amateurs de rhums ont tous une bouteille d’Appleton 8 ou 12 ans qui traîne dans un coin de leur cave.
Cela reste quand même LE grand classique et goûter ici ce millésime rare et hors du temps est juste magique… je pars trois minutes pleurer et je vous laisse là.
Encore un peu de lecture ?
One thought on “Appleton 50 ans”
Comments are closed.